Monsieur Divertissement: Salut Stevee! Ça fait quelques mois qu’on se connaît et j’adore l’Alliance de Lutte Canadienne. Mais il faut avouer que j’ai entendu beaucoup de choses sur toi. Tu m’as dit que tu voulais tout raconter, mettre les affaires au clair. La parole est à toi.
Stevee Starr: Je crois que c’est très important. Le monde a toujours tendance à penser que ce que qu’on était dans le passé est c’est ce qu’on est présentement. Mes erreurs du passé font le promoteur que je suis devenu aujourd’hui. Honnêtement, ce ne sont pas tous les promoteurs qui ont un passé propre, mais ça ne change rien au bon travail qu’ils font présentement. Grâce à ma tournée estivale, j’ai rencontré beaucoup de nouveaux talents qui ne voulaient pas se joindre à moi à cause de mon passé, mais qui maintenant voient que ça va bien et vont lutter pour l’ALC dans le futur.
Mr D: Tu m’as dit que tu voulais tout raconter Stevee, alors partons du début.
Stevee: Mon père était un jeune lutteur père de trois enfants, deux gars et une fille. Je suis allé voir la WTA alors que mon père ne luttait pas encore. J’étais très impressionné par Johnny Krugger, Michel Piché, Stone Cold Aubin… Mon père a commencé a lutté à la WTA peu après en 94 ou 95. J’étais turbulent et pas souvent à la maison. J’ai pratiquement grandi en centre jeunesse jusqu’à mes 18 ans.
J’avais à peine 8 ans quand j’ai pris mes premiers bumps avec Ronny Krugger, mais j’aurais jamais dû devenir lutteur. Je suis épileptique, j’ai eu beaucoup de problèmes de santé quand j’étais jeune. Les médecins refusaient que je lutte. Mais j’adorais Serge et Ludger Proulx, Michel Piché, Guy Sauriol… Mon idole c’était Carl Leduc! Je voulais faire ça quand je serais plus grand. Mais je suis hyper actif en plus d’être T.D.A.H.H.H.! Médicamenté… La lutte m’aidait vraiment beaucoup. Mais on me disait toujours: Non, tu ne lutteras jamais!
À 16 ans, je me suis tanné et j’ai décidé que j’allais lutter. Je n’habitais plus chez mes parents, j’étais placé; je me suis dit que j’étais libre de ma propre destinée. J’ai été voir Michel Piché à la WTA, mais il était très réticent vu qu’il était en conflit avec mon père Jimmy Starr à l’époque. Il a fini par changer d’idée, et j’ai participé à ma première pratique en septembre 2001. Ayant grandi dans la lutte, je connaissais déjà tous les moves. Mon père avait lutté partout au Québec ICW, FCL, CCW…
C’est ma première pratique et tout le monde est impressionné. Tellement qu’on me demande d’arbitrer le soir même! La semaine d’après je fais mon premier combat en équipe avec Jack Travis contre Michel Piché et Dom Krugger. On avait triché avec une chaise, alors à la fin du combat Michel Piché me dit: « Lève-toi le Kid, on va avoir du fun! » J’ai la chienne; j’ai 16 ans et la légende Michel Piché est là devant moi qui me dit que la semaine prochaine on va faire un match de chaises! Whoooaa!
Mon premier combat en simple, Stevee P (je pouvais pas m’appeler Starr à cause du conflit avec mon père) a battu la légende Michel Piché! Quelle confiance incroyable on avait en moi. Malheureusement, quelques mois plus tard, mon comportement agressif m’a obligé à quitter la WTA. Je t’ai dit que j’ai eu une enfance difficile, alors je tombe dans la drogue. J’ai quitté le monde de la lutte de 2002 à 2007. Je vends de la drogue, je commets des crimes et je me ramasse souvent en prison à cette époque là.
Je reviens à la lutte en 2007 grâce à WishMaster, un lutteur de la FLQ qui avait sa propre fédération à Beauharnois, la PWE. Je deviens Georges le Fermier. Je sors de prison et j’ai mon premier fils alors je reste tranquille. Je gagne mon premier championnat, le titre hardcore, contre Crazy Celtic. 2008 arrive et la PWE ferme, mais la Showcase Wrestling Revolution (SWR) prend son envol à Lachine grâce à Rick Ross et Jean Laurence. Georges le Fermier disparaît et je décide de finalement de prendre le nom familial comme Ricky et Jimmy. C’est la naissance des Starr Brothers!
J’habite ensuite à Victoriaville et Drummondville, j’ai 3 enfants et la lutte va très bien pour moi. De 2008 à 2018, je lutte partout au Québec EWR, ICW, FCL. Je fonde la Victoriaville Canadian Wrestling en 2012.
J’ai affronté Soa Amin, Justin Credible, Darko! En 2015, je me suis séparé. Peu après c’est mon dernier show de la VCW… J’ai eu des problèmes financiers et j’ai pas pu payer tous mes gars. Je me suis donc pas mal effacé du monde de la lutte et en 2018 je suis retombé dans la drogue, j’ai fait de la fraude et je me suis ramassé en prison.
Je sors en 2019, les gens ne me font pas confiance. J’ai lutté sur le show de retraite à mon père, c’est pas mal tout. En 2021, j’ai connu une fille et je pars la ALC. On se sépare et je tombe dans le néant. J’ai des gros problèmes de dépendance affective à cause de tout ce qui s’est passé dans ma jeunesse. Je commence à consommer des drogues dures. Beaucoup. Je me suis ramassé en prison encore une fois. Possession de stupéfiant et violence conjugale. J’en parle aujourd’hui, car c’est aussi important pour l’agresseur que pour la victime d’en parler. Rassures-toi! J’ai pas battu ma femme; elle m’a frappé et je l’ai frappé. Mais ça reste grave, surtout dans le contexte actuel. En prison, j’ai compris que je devais changer. J’en ai profité pour faire de la thérapie sur la gestion de la colère, la violence, la gestion des émotions et la consommation…
2 semaines après ma dernière sortie de prison, la ALC produisait un événement dans un camping à Granby! J’ai co-produit avec mon frère et j’ai appris que le proprio du camping était au courant de mes séjours en prison et tout ça, et qu’il va toujours m’encourager tant que je continue de bien me comporter et de me réhabiliter. Je suis allé en thérapie par moi-même, sans que la juge ne le demande. Octobre 2022, la ALC débarque à Montréal! La ALC fait jaser, on dérange. On remplit nos salles, on fait affaire avec Jean-François Kelly et Jacques Rougeau. Ça inquiète notre compétition.
Je ne te dis pas que c’est facile de changer, de ne pas avoir de consommer quand je me lève le matin. Mais j’ai des amis qui m’appuient, ma femme qui m’encourage tous les matins. Je suis tellement chanceux, car je suis encore épileptique et médicamenté aujourd’hui, mais c’est grâce à la lutte si je suis encore là.
Le message que je veux passer est pour tous les jeunes qui ont fait des erreurs dans la vie, il y a toujours moyen de se relever. Il faut accepter son passé et ses erreurs et vouloir changer. Et bien s’entourer. J’ai Danny Kidman qui est super important dans l’équipe, et Michel Ayotte (Blazer) qui était là dans mes pires moment avant que je rencontre ma conjointe. J’ai quatre enfants dont un autiste, mais il adore la lutte et ça l’aide aussi, je me vois dans lui. J’ai parfois le goût de tout abandonner et vendre, mais la fatigue disparaît dès que je traverse le rideau et que je vois la passion des fans!
Mr D: J’ai lu que Thomas Argouin allait faire parti du spectacle du 8 septembre?
Stevee: Oui, Thomas va se joindre à l’ALC pour plusieurs galas. Il a déjà commencé avec des apparitions à Granby et à St-Nazaire! Parfois, 3h de lutte consécutive, c’est long. Il y a des gens qui décroche. Et j’ai réalisé au Festival du Gros Gras que c’était le fun d’avoir un peu de tout en tant que divertissement. Alors je vais avoir Thomas qui va ajouter un peu de divertissement avec ses chansons. J’ai une petite primeur pour toi… Thomas va devenir le nouveau Commissaire de l’ALC!
Mr D: Parle moi un peu des Starr Brothers.
Stevee: Quand je suis devenu un Starr Brothers, on est immédiatement devenu champion par équipe de la SWR. On luttait partout au Québec contre Crime Inc! On s’attaquait dans les chars, c’était hot. On a pas lutté ensemble pendant 15 ans, et récemment on a décidé de se réunir pour une dernière run! C’est super le fun et je suis vraiment fier de tout ce qu’on a accompli à date!
Mr D: Qu’est-ce que tu aimes le plus dans la lutte?
Stevee: Quand j’ai fini mon combat et qu’un enfant de 7 ans me demande de me faire photographier avec lui. Le sentiment que je ressens… On m’offrirait un million de dollars en échange et je dirais non! J’ai manqué d’amour dans ma vie, et ces petits moments là sont inestimables à mes yeux. A Drummond, j’étais dans les méchants et il y avait un enfant handicapé qui nous adorait. Je lui ai donné mon bandeau; mon bandeau est encore sur son mur aujourd’hui! Il s’est senti important et j’ai fait une petite différence dans sa vie, c’est pour ça que je fais ça.
Mr D: A quoi peut-on s’attendre de la ALC pour sa prochaine saison?
Stevee: J’aimerais que ce soit un bon mélange de l’ancienne génération, de la génération actuelle et de la prochaine! En tant que promoteur, il faut leur laisser chance. Quand j’étais jeune, les vétérans ne voulaient pas laisser leur place. Récemment, Frank Evans a pris le micro pour dire aux jeunes de prendre leur place. Ça fait 16 ans qu’il fait ça, c’est leur tour. C’était pas comme ça à l’époque. Malheureusement les jeunes aujourd’hui veulent lutter pour l’argent. Les vétérans, on faisait ça juste par passion!
Stevee: Si j’ai un autre message à donner aux jeunes, tenez vous loin de la drogue et de la rue. Je suis chanceux, ma femme me garde dans le droit chemin. Avant j’avais pas d’allure. Chaque fois qu’un adversaire ratait un spot, je le frappais pour vrai. C’est déjà arrivé avec Jeremy Prophet, on était devenus les pires ennemis! J’étais une vraie tête brulée! Aujourd’hui, on me fait 100 fois pire et je réagis même plus; on apprend. On peut changer, j’en suis la preuve vivante! Si vous décidez de vous prendre en main, il y aura des gens autour de vous pour vous supporter.
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